Le phrasé opaque dans “Le parking”

A quoi sert le titre d’une œuvre ? A fixer le sens de ce qui se donne à voir ou à transporter la pensée vers d’autres imaginaires. L’écrit et la figure fabriquent ensemble l’aura mystérieuse de « La trahison des images », « Le paysages fantôme » et plusieurs autres peintures de René Magritte.

C’est ce que confie le surréaliste belge à propos de la fonction du couple mot-image dans sa pratique. A l’extérieur ou à l’intérieur de l’œuvre, le mot semble engager un discours dans le murmure des signes visuels.

Dans l’œuvre de Oussama Ben Sassi, l’intitulé fonctionne autrement que comme une légende, nous invitant à scruter de près l’interaction entre le langage verbal et visuel dans son lexique truffé de superpositions énigmatiques.

«Parking », le titre du collage digital de Ben Sassi trouve son double inscrit sur le pan du mur délabré dans le premier plan de l’œuvre.

Des fragments de villes apparaissent, amenant des perspectives lointaines et proches. La composition de l’affiche est marquée par l’image inversée du haut qui crée une spatialité déroutante, empêchant une lecture formelle classique du paysage. Sommes-nous ici dans le parking ou ailleurs, là où les images des bâtiments, du silo central et du panorama rural nous transportent. Le mouvement du regard, circulant dans la chaîne sémantique des lieux urbains, est interrompu par le plan architectural intérieur et les deux graphismes de poissons.

Le rectangle noir duquel se détache les mains posées sur le drapé rouge participe à la suspension du décodage des signes qui s’apparentent les uns aux autres.

Ce fond géométrique sombre qui se compose avec des figures du réel est récurrent dans le travail de Ben Sassi. Emboîter le pas du sens littéral des choses lisibles en partant du titre, débouche-t-il ainsi sur un phrasé opaque, un verbiage incohérent ? Cela veut-il dire que l’artiste sème des indices pour récolter le dialogue impossible entre ce qui semble former d’un côté les signifiants de la ville, de l’autre les motifs qui brisent la lecture linéaire de l’ensemble.

Sinon, cela peut rappeler que les mots qui accompagnent les perceptibles esthétiques réveillent en nous, par curiosité ou par admiration, la propension anthropologique de la quête du sens. Se trouvant face à la vertigineuse impossibilité de déchiffrer le message, la contemplation des qualités visuelles et tactiles propres aux figures et aux médiums est inéluctable.

Par Hanen Hattab

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